Empoisonné, abattu ou noyé ? Comment Raspoutine est-il vraiment mort ?

Proche conseiller de la famille royale russe, le paysan mystique se fit des ennemis mortels. Son violent assassinat, survenu en 1916, suscita maintes légendes, laissant aux historiens le soin de démêler le vrai du faux.

De Helen Rappaport
Publication 13 janv. 2024, 17:31 CET
Penetrating stare

Photographié l’année de sa mort, Grigori Raspoutine était célèbre pour l’intensité de son regard bleu perçant que révèle cette image colorisée.

PHOTOGRAPHIE DE Mary Evans, Fotostock

Note de la rédaction : les dates citées dans cet article correspondent au calendrier julien en usage en Russie à l’époque des faits. Il y a un décalage de treize jours par rapport au calendrier grégorien utilisé de nos jours.

Dans la nuit du 16 au 17 décembre 1916*, l’un des plus grands palais de Russie fut le théâtre d’un assassinat. Ce crime marqua le point culminant d’une hideuse campagne orchestrée à la fois contre la victime et contre ses protecteurs impériaux. Alors que la Première Guerre mondiale ravageait l’Europe et que la Russie glissait inexorablement vers la révolution, l’élite tsariste n’en fut que plus déstabilisée.

Plus de cent ans après les faits, le traitement sensationnaliste de l’assassinat de Grigori Raspoutine, pendant si longtemps présenté à tort comme un moine fou, continue de déformer la vérité de son étroite relation avec le dernier tsar et la dernière tsarine de Russie : Nicolas et Alexandra. La façon qu’eut cet humble paysan et ancien marchand de chevaux d’obtenir un accès aussi unique aux solitaires Romanov alarma le cercle rapproché de l’empereur qui diabolisa Raspoutine et ses partisans. 

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    Sur cette photographie prise vers 1909, Raspoutine pose avec la tsarine Alexandra, ses quatre filles, son fils, Alexis et la nourrice de ce dernier, Maria Vishnyakova.

    PHOTOGRAPHIE DE Alamy, ACI

     

    DE LA CAMPAGNE À LA COUR

    Né en 1869 de parents paysans, Grigori Efimovitch Raspoutine grandit à Pokrovskoïe, obscur village de l’ouest sibérien distant de Saint-Pétersbourg de plus de 2 500 kilomètres. Sur son éducation, on ne peut affirmer que peu de choses avec certitude, car les archives sont rares. À l’âge de 19 ans, il épousa Praskovia Fiodorovna Doubrovina, qui lui donna plus tard quatre enfants. Quand il quitta le domicile, en 1892, sa famille resta seule. On dit que Raspoutine aurait eu une épiphanie religieuse et qu’il aurait passé trois mois dans un monastère, bien qu’il ne fût jamais ordonné prêtre. À la place, il erra en Russie durant plusieurs années à la recherche d’une illumination spirituelle, dans la droite ligne de la tradition du saint homme itinérant russe.

    En 1905, on le retrouve établi à Saint-Pétersbourg en tant que gourou spirituel et guérisseur alors que l’intérêt pour la médecine alternative et l’occulte est en vogue au sein de l’élite russe. Là, il se constitue un cercle d’adorateurs, d’adoratrices principalement, qui le révèrent comme un homme de Dieu. Mais bientôt, des rumeurs commencent à circuler concernant le comportement libidineux de Raspoutine qu’on accuse d’être un buveur invétéré et un prédateur sexuel.

     

    INTÉGRER DANS LES CERCLES ROYAUX

    Raspoutine mena une double vie étrange et contradictoire. En présence de ses admirateurs, il cultivait une image sobre et sage et prônait la pureté du corps et de l’esprit. Loin d’eux, Raspoutine pouvait se déchaîner et faire preuve d’un comportement d’ivrogne et de pervers sexuel. Projeter une image pieuse en permanence était une tâche ardue ; Raspoutine était un homme profondément tiraillé, partagé entre ses profondes croyances religieuses et une pulsion rebelle non moins profonde qui le portait vers le péché.

    Le public russe était déjà hautement suspicieux de Raspoutine quand il fut présenté au tsar et à la tsarine en 1905. Sa réputation de guérisseur le rapprocha de la famille royale en raison de la mauvaise santé de leur fils et héritier, le tsarévitch Alexis, qui était atteint d’hémophilie. En 1908, Raspoutine aurait fait usage de ses dons pour apaiser la souffrance d’Alexis lors d’un épisode grave. Alexandra vit en Raspoutine un véritable guérisseur et compta sur lui pour veiller sur la santé d’Alexis.

     

    INFLUENCE DANGEREUSE

    Cependant, Raspoutine ne put limiter son rôle aux domaines de la santé et de la spiritualité. Il commença également à conseiller politiquement Nicolas et Alexandra. Ce faisant, il se fit des ennemis au sein de l’aristocratie et du gouvernement russes. D’autres membres de la famille Romanov méprisaient Raspoutine, en qui ils voyaient un charlatan et un escroc. Alexandra se brouilla avec sa propre sœur, la grande-duchesse Élisabeth Feodorovna, après qu’elle l’eut mise en garde au sujet de Raspoutine. La situation s’aggrava tant que même Alexandra ne put protéger son cher « Père Grigori » de la haine que lui vouaient sa famille et ses amis.

    En 1792, Catherine la Grande fit construire le palais d’Alexandre à Tsarskoïe Selo, résidence impériale favorite du tsar Nicolas II.

    PHOTOGRAPHIE DE Age Fotostock

    En 1915, en pleine Première Guerre mondiale, Nicolas quitta la Russie pour passer du temps sur le front de l’est. Seule et désemparée, Alexandra commença à passer de plus en plus de temps en compagnie de Raspoutine. Ce dernier disposait désormais de son chauffeur personnel pour l’emmener à Tsarskoïe Selo pour des séances de prière privées avec la tsarine.

    Les ragots concernant leur relation prirent une tournure affreuse. Au sein de la famille Romanov, on s’inquiétait de plus en plus qu’Alexandra ne compromette la réputation de la famille. Selon des rumeurs sordides, alimentées par des images pornographiques à l’effigie de la tsarine et du mystique, sa relation avec Raspoutine était devenue de nature sexuelle. On parlait désormais de Raspoutine et d’Alexandra comme de forces obscures qui mèneraient la Russie à la ruine.

     

    UN DANGER POUR LA RUSSIE

    Raspoutine faisait depuis longtemps l’objet de menaces de mort, et bientôt on appela ouvertement et largement à son éloignement, par tous les moyens nécessaires. Depuis une attaque au couteau perpétrée par une femme en juin 1914 qui l’avait laissé avec une blessure presque fatale à l’estomac, un agent de police l’accompagnait partout. Personne ne pouvait s’approcher suffisamment de lui pour le tuer, car la personne de Raspoutine était toujours bien gardée.

    Statue de Raspoutine à Tioumen, ville sibérienne où, en 1914, il échappa à une tentative d’assassinat.

    PHOTOGRAPHIE DE Shutterstock

    La prétendue influence de Raspoutine sur la tsarine préoccupa sérieusement plusieurs membres éminents de la famille Romanov. Ces derniers soutinrent tacitement un complot ourdi par un jeune homme impétueux et inexpérimenté de 29 ans : le prince Félix Ioussoupov.

    Né dans l’une des plus riches familles de Russie et marié à Irina, la nièce de Nicolas II, Félix Ioussoupov considérait qu’il relevait de son devoir patriotique de débarrasser la Russie de Raspoutine. Une fois Raspoutine écarté, Félix Ioussoupov avait l’intention de restaurer la réputation du tsar et de faire en sorte que Nicolas compte davantage sur sa famille étendue, sur la noblesse et sur la Douma.

    En octobre 1916, Félix Ioussoupov incita son ami de 25 ans Dimitri Pavlovitch, grand-duc et cousin du tsar, à planifier l’assassinat avec lui. À la fin de novembre, ils avaient recruté Vladimir Pourichkevitch, membre de la Douma d’État qui avait déjà publiquement étrillé Raspoutine. Deux autres personnes furent recrutées pour mener à bien le plan final : un garde impérial, le lieutenant Sergei Soukhotine, et un médecin polonais, Stanislav Lazovert, dont le rôle serait d’aider à administrer le poison (des cristaux de cyanure de potassium) que Félix Ioussoupov s’était procurés.

     

    L’ASSASSINAT DU MOINE

    Le plus célèbre récit des événements des 16 et 17 décembre 1916 provient des propres écrits de Félix Ioussoupov, publiés une décennie après la mort de Raspoutine. Dans La Fin de Raspoutine (puis dans ses Mémoires, publiés dans les années 1950) Félix Ioussoupov expose du début à la fin les plans qui menèrent à l’assassinat. Pour commencer, Félix Ioussoupov avait pris soin de faire la connaissance de Raspoutine dans les semaines précédentes en le consultant plusieurs fois pour des problèmes de santé.

    La famille Ioussoupov possédait un palais sur la Moïka, à Saint-Pétersbourg, qui fut choisi comme le lieu où serait perpétré l’assassinat. Félix Ioussoupov inviterait Raspoutine à la Moïka pour qu’il y rencontre sa femme, la splendide princesse Irina. Pour dissimuler la visite et échapper à son dispositif de sécurité, il était prévu que Raspoutine arrive très tard le 16 décembre.

    Félix Ioussoupov avait préparé une petite chambre en sous-sol pour recevoir Raspoutine. Faiblement éclairée par des lanternes colorées et un feu de cheminée ardent, la pièce était richement décorée d’œuvres d’art et de curiosités, de chaises sculptées en chêne, de cabinets d’ébène, d’un tapis persan et d’un tapis en peau d’ours blanc. La table était dressée avec un samovar pour le thé, des biscuits et des gâteaux raffinés ; du type qui plaisait à Raspoutine, selon Félix Ioussoupov. Avant l’arrivée de Raspoutine, Sergei Soukhotine avait moulu le poison en une fine poudre que Stanislav Lazovert aurait saupoudrée à l’intérieur des pâtisseries. Félix Ioussoupov avait également fourni à Dimitri Pavlovitch et à Vladimir Pourichkevitch du cyanure de potassium à mettre dans le vin de Raspoutine.

    Juste après minuit, Stanislav Lazovert, déguisé en chauffeur, conduisit Ioussoupov chez Raspoutine, 64 rue de Gorokhovaya. Les filles de Raspoutine se souvinrent plus tard qu’il semblait de bonne humeur cette nuit-là mais qu’il semblait également particulièrement nerveux, comme s’il sentait que quelque chose se tramait. Raspoutine s’était habillé pour l’occasion ; il portait une chemise de soie brodée de bleuets (faite spécialement pour lui par la tsarine), une culotte de velours et des bottes vernies. Il avait fait sa toilette et s’était peigné les cheveux et, ainsi que le raconta Félix Ioussoupov, sentait le savon bas de gamme.

    Le 16 décembre 1916, Ioussoupov prépara soigneusement une pièce située en sous-sol dans son palais de la Moïka, à Saint-Pétrsbourg, à gauche. Il l’organisa de sorte à faire montre de sa richesse et de son bon goût pour distraire sa victime. De nos jours, le palais est un musée comportant des salles dédiées à l’assassinat de Raspoutine.

    PHOTOGRAPHIE DE AKG, Album

    Pendant ce temps, Dimitri Pavlovitch et Vladimir Pourichkevitch, restés au palais de la Moïka, faisaient croire qu’une fête battait son plein à l’étage. En pénétrant dans le palais par une porte latérale, Raspoutine, Lazovert et Ioussoupov entendirent de la musique sortir du phonographe à l’étage. Deux jeunes femmes venaient également d’arriver. Raspoutine croyait qu’à un moment ou à un autre, la belle Irina viendrait à sa rencontre au sous-sol. Irina avait en fait refusé d’être impliquée dans les événements de cette nuit-là et se trouvait loin de là, dans une propriété familiale, en Crimée.

     

    TENTATIVES DE MEURTRE

    Félix Ioussoupov offrit les petits gâteaux à Raspoutine. D’abord, il les refusa. Puis, il se résolut à en prendre un avec réticence, puis un second. Rien ne se produisit. Félix Ioussoupov ne parvenait pas à comprendre pourquoi le poison ne produisait pas d’effet. Il persuada ensuite son invité de goûter au vin de Madère issu de ses propres vignes de Crimée après être parvenu à introduire subrepticement du poison dans son verre. Raspoutine but le vin « à la manière d’un connaisseur », puis en but de nouveau, mais là encore, mystérieusement, le poison n’eut aucun effet.

    Les choses continuèrent ainsi pendant un certain temps. Raspoutine convainquit Ioussoupov de jouer de la guitare pour le divertir. Il but plus de thé, sa tête s’affaissa et ses yeux se fermèrent. Il était fatigué, mais pourtant, deux heures plus tard, le poison n’avait pas toujours pas fait son œuvre.

    Tout ce temps, les co-conspirateurs de Félix Ioussoupov attendaient à l’étage. De plus en plus agité, ce dernier se résolut à aller les consulter. Vladimir Pourichkevitch se souvint plus tard que Félix Ioussoupov lui avait dit, hors de lui, que « le seul effet du poison que j’observe est qu’il rote constamment et qu’il bave un peu ».

    Selon les récits de l’assassin, Ioussoupov aurait tiré sur Raspoutine avec un Browning et Pourichkevitch lui aurait tiré dessus avec un pistolet Savage semi-automatique semblable à celui présenté ci-dessus.

    PHOTOGRAPHIE DE Alamy, ACI

    Le trio décida qu’il n’avait d’autre option que d’abattre Raspoutine. Félix Ioussoupov alla tirer un pistolet Browning de son secrétaire et retourna au sous-sol où il trouva un Raspoutine haletant, se plaignant d’avoir la tête lourde et une sensation de brûlure dans l’estomac. Quand Raspoutine se redressa, Félix Ioussoupov leva son arme, tira sur lui et le toucha au flanc. Dimitri Pavlovitch et Vladimir Pourichkevitch descendirent précipitamment et virent Raspoutine allongé sur le tapis en peau d’ours. Stanislav Lazovert déclara que Raspoutine était mort, et les conspirateurs disparurent à l’étage.

    Mal à l’aise, Félix Ioussoupov redescendit pour voir de nouveau le corps. Alors qu’il s’approchait de lui, les yeux de Raspoutine s’ouvrirent : « Les yeux verts d’une vipère qui me regardaient avec un air de haine diabolique », se souvint-il.

    Soudain, dans un effort surhumain, Raspoutine se mit debout et se jeta sur Félix Ioussoupov dans un rugissement bestial pour tenter de l’attraper à la gorge. Malgré le poison et la balle dans la poitrine, Raspoutine sembla trouver une force immense mais retomba presque aussitôt violemment sur le dos. À ce stade, le récit de Félix Ioussoupov manque de crédibilité et prête des pouvoirs démoniaques à l’homme blessé.

    Complètement terrifié, Félix Ioussoupov se précipita à l’étage pour chercher de l’aide et fut pris de haut-le-cœur tant il avait peur. Vladimir Pourichkevitch décida de reprendre la situation en main. Armant son pistolet Savage, il descendit et s’aperçut que Raspoutine était parvenu à sortir par la porte latérale dans la cour couverte de neige où il titubait vers la gauche dans son agonie.

    Raspoutine tenta de s’enfuir par cette cour du palais de Félix Ioussoupov ce fameux soir de décembre 1916.

    PHOTOGRAPHIE DE Bridgeman, ACI

    Vladimir Pourichkevitch tira une fois et manqua sa cible ; puis une seconde fois, en courant, et manqua de nouveau sa cible. Malgré sa blessure, Raspoutine, rampait à genoux et allait atteindre le portail de la cour quand Vladimir Pourichkevitch tira une troisième fois et le toucha dans le dos. Il tira ensuite un quatrième coup, fatal, directement dans le front de Raspoutine.

    Pavlovitch, Soukhotine et Lazovert, se débarrassèrent ensuite du corps de Raspoutine. Ils l’enveloppèrent dans un tissu épais et l’attachèrent avec de la corde. Ils le traînèrent dans la voiture de Dimitri Pavlovitch et conduisirent jusqu’au grand pont Petrovski sur la Neva, d’où ils jetèrent le cadavre qui transperça la glace au-dessous. Ils prirent le chemin du retour alors que le jour poignait.

     

    LA CHUTE

    Des rumeurs concernant la disparition et l’assassinat probable de Raspoutine se propagèrent à toute vitesse à Saint-Pétersbourg. Au palais Alexandre, à Tsarkoïe Selo, la tsarine attendait avec anxiété qu’on lui donne des nouvelles tandis que la police lançait des recherches. Le 19 décembre, le corps de Raspoutine, les bras gelés dans une position étrange au-dessus de la tête, fut découvert par la police fluviale près de l’île Krestovski. Quand la nouvelle se répandit, on manifesta sa joie dans les rues, on alla réciter des prières à l’église et on alluma des bougies au pied des icônes. On acclama Félix Ioussoupov et Dimitri Pavlovitch comme des héros nationaux.

    Le corps meurtri de Raspoutine fut extrait des eaux de la Neva quelques jours après son assassinat. D’après l’autopsie, on lui avait tiré dessus à trois reprises : dans la poitrine, dans le dos et dans la tête.

    PHOTOGRAPHIE DE Getty Images

    Les restes de Raspoutine furent emmenés dans un camion de la Croix-Rouge pour les vétérans de l’armée. Sur ordre de Nicolas II, une autopsie fut réalisée sur le cadavre encore gelé le soir même. Un médecin du nom de Dimitri Kosorotov établit qu’on avait tiré sur Raspoutine trois fois avec des revolvers de calibres différents : une fois sur le côté gauche de la poitrine, une autre fois dans le dos et un coup fatal, tiré à bout portant, possiblement par un revolver .455 Webley, dans la tête. Aucune trace de poison ne fut découverte dans le corps, seulement de l’alcool.

    Pendant plus de cent ans, le récit de Félix Ioussoupov fut la source acceptée concernant l’assassinat de Raspoutine, quoique les réserves quant à son exactitude soient nombreuses. Un des plus importants points de discorde concerne la présence ou non de poison dans les gâteaux. Peu de temps avant sa mort, Stanislav Lazovert affirma qu’il avait hésité à empoisonner Raspoutine et qu’il avait substitué au cyanide un produit inoffensif. Le récit spectaculaire fait par Félix Ioussoupov des événements de la nuit, qu’il soit exact ou non, s’est ancré dans l’imaginaire populaire.

     

    CONSÉQUENCES

    On dit que la tsarine Alexandra aurait récupéré la chemise brodée que Raspoutine portait et qu’elle la chérit comme un talisman religieux. Après l’autopsie, on prépara le corps de Raspoutine en vue de son inhumation et l’on posa une icône à l’effigie de la famille impériale sur sa poitrine. À minuit, le 21 décembre, le cercueil en zinc de Raspoutine fut emmené au parc Alexandre à Tsarskoïe Selo, où il fut enterré dans le secret en présence de Nicolas, d’Alexandra et de quelques autres, à l’endroit où une nouvelle chapelle était en train d’être construite.

    Les autorités arrêtèrent rapidement les conspirateurs et les assignèrent à résidence. En guise de punition, le tsar exila Félix Ioussoupov dans une propriété familiale dans l’oblast de Belgorod. Le grand-duc Dimitri fut banni de la cour et envoyé au combat sur le front perse. Le traitement réservé à ce dernier suscita une opposition fervente au sein de la famille Romanov, mais cette décision lui sauva probablement la vie. Quand l’autocratie tsariste s’effondra après la révolution de février 1917, Dimitri était loin du danger.

    Boîte à bijoux avec les portraits de Nicolas II et d’Alexandre produite à l’occasion du tricentenaire de la dynastie Romanov en 1913.

    PHOTOGRAPHIE DE D. Bayes, Bridgeman, ACI

    Les conspirateurs affirmaient avoir tué Raspoutine pour sauver le trône de Russie, mais il semble que leurs actes n’aient pas été d’une grande aide pour la monarchie sur le long terme. Des tensions provoquées par la Première Guerre mondiale et par les troubles intérieurs éclatèrent quelques mois après la mort de Raspoutine. Après la révolution de 1917, Nicolas II abdiqua et mis fin à trois siècles de règne des Romanov. Nicolas, Alexandra et leurs enfants furent emprisonnés par le gouvernement provisoire russe et exilés, d’abord en Sibérie, puis à Ekaterinbourg. La famille entière y fut assassinée en juillet 1918.

    Début mars 1917, la dernière demeure de Raspoutine fut découverte à Tsarskoïe Selo. Le gouvernement provisoire craignait que sa tombe ne devienne un lieu de pèlerinage et ordonna sa destruction. Le cercueil fut exhumé dans le secret, et les restes de Raspoutine furent brûlés. Pour le public russe, nourri par une haine de lui irrationnelle et ancrée, ce fut une fin appropriée.

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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